Archive pour le mot-clef ‘psychotropes’

Djihadisme ou psychotropes

mardi 15 octobre 2019

Après chaque tuerie barbare, se pose l’inévitable question de son lien avec le terrorisme islamiste. Chaque enquête commence par cette interrogation dont la réponse conditionne toutes les suites juridiques et sociopolitiques. Cela est compréhensible puisque le lien entre la radicalisation islamiste et la barbarie a été dûment établi par une longue succession de faits.

Cependant, aucune science, qu’elle soit sociale, biologique ou physique ne peut progresser en se contentant de rabâcher de vieilles corrélations. Les réflexions circulaires conduisent à des paradigmes qui finissent par ressembler à des dogmes. Il faut ouvrir de nouvelles portes.

Rechercher la motivation (prosélytisme, mission divine, radicalisation) des homicides barbares, c’est n’en traiter que l’aspect cognitif, en projetant notre rationalité d’observateur, de commentateur ou d’enquêteur sur l’auteur de l’homicide. C’est en négliger la barbarie, l’irrationalité, le délire, l’impulsivité, le caractère irrépressible, la folie suicidaire, autant d’aspects qui ne relèvent plus de processus cognitifs mais d’évènements neurophysiologiques.

Nous avons déjà de nombreuses données et de nouvelles pistes de recherche pour mieux comprendre ce phénomène. Les psychotropes et toutes les substances psychoactives sont connues depuis longtemps pour provoquer des actes « insensés » chez des personnes dont on semble se plaire à répéter que rien ne les y prédisposait.

La secte des islamistes haschischins est historiquement connue pour nous avoir fourni le mot « assassin ». Nous connaissons le rôle de l’alcool sur la témérité des poilus, l’usage de diverses drogues dans les grandes offensives militaires et celui des amphétamines dans les réseaux djihadistes. Le risque suicidaire des antidépresseurs est désormais bien documenté, comme le sont les homicides sous benzodiazépines, l’induction psychotique du cannabis, et les hallucinations de divers psychédéliques.

Dans le dernier attentat qui a fait 4 victimes, on sait même que l’assassin avait entendu des voix la veille de son acte. Etonnant non !

Pourtant, en écoutant les enquêteurs, en ouvrant les radios, en lisant les journaux, en écoutant les préfets et ministres, je n’ai jamais entendu parler de recherches sur la prise possible de psychotropes.

Lorsque l’on avait réalisé que plus de la moitié des accidents de la route étaient liés à l’alcool, on avait généralisé les éthylotests après chaque accident ou infraction. Nos données sur les liens entre substances psychoactives et barbaries sont aujourd’hui bien meilleures. Pourquoi aucune enquête ne commence par le dosage de ces substances ? Pourquoi aucun préfet ne le suggère, pourquoi aucun enquêteur ne semble même se poser la question ? Pourquoi aucun député n’a l’idée d’aborder ce thème ?

Un tel niveau de silence sur les psychotropes dépasse l’entendement. On ne peut plus parler de négligence ou d’ignorance, il faut presque parler d’omerta.

Références

Cas clinique de la France

lundi 25 avril 2016

Le diagnostic d’un patient résulte souvent du « flair clinique » basé sur l’expérience du clinicien, mais il convient de l’étayer par des arguments paracliniques (analyses et images). Cette méthode est théoriquement applicable au diagnostic d’un pays. Dire que la France est dépressive est un sentiment viscéral que le clinicien doit étayer. Ce sont alors des indicateurs sociaux, politiques et économiques qui serviront d’éléments paracliniques.

Le nombre de touristes indique l’attractivité, mais n’est pas un indicateur du registre psychiatrique qui nous intéresse ici. Les records de consommation de pesticides et d’antibiotiques sont plus pertinents, car ils orientent vers une phobie des microorganismes.

L’indicateur le plus pertinent est le record de consommation de psychotropes, en particulier benzodiazépines (tranquillisants) et antidépresseurs.

Le ratio, supérieur à la moyenne, de djihadiste et consommateurs de cannabis parmi les adolescents et jeunes adultes peut servir d’indicateur d’instabilité psychique.

La France est sur le podium pour le chômage, facteur de risque de nombreuses pathologies, dont la dépression. Le record du nombre d’animaux domestiques par habitant pourrait argumenter un désordre affectif.

La France détient également des records pour le nombre de jours de congé-maladie, mais la fréquence de ces maladies itératives n’a manifestement pas d’impact sur l’espérance moyenne de vie à la naissance. Ce qui suggère une prépondérance du registre psychosomatique sans répercussion organique notable. Réjouissons-nous cependant, d’avoir été dépassés par d’autres pays, pour cet indicateur. Nous avons aussi quitté le podium de la morbidité par accident de travail.

Notre record du plus faible nombre d’heures de travail annuel est un symptôme d’interprétation clinique délicate, car il peut être soit le facteur de notre bonne santé, soit le signe d’une fatigue chronique. La deuxième interprétation doit être privilégiée en raison de la bonne santé des travailleurs indépendants, non concernés par cet indicateur.

Ces arguments paracliniques confirment le diagnostic de dépression. La psychanalyse, dont notre pays est le dernier bastion, pointe toujours la responsabilité de la mère. Marianne serait donc coupable de tout. La psychiatrie moderne, plus pertinente et moins misogyne, essaierait de déterminer le type de notre dépression nationale. Est-elle réactionnelle, donc passagère, unipolaire, donc continue, bipolaire, donc cyclique ? Plusieurs nouveaux indicateurs orientent vers la maladie bipolaire où alternent des phases maniaques et des phases dépressives.

La France est sur le podium du nombre de jours de grève, symptôme de désinhibition sociale et elle possède le record absolu du nombre de partis politiques, symptôme d’histrionisme. Deux symptômes du registre maniaque, au même titre que les révolutions, manifestations et contestations dont nous avons la primeur historique.

Maladie bipolaire à valider au prochain staff de cas cliniques.

Références

Pharmacologie du suicide

vendredi 17 avril 2015

La dépression est une entité médicale qui n’a jamais obtenu de définition satisfaisante. L’imipramine a été le premier médicament considéré comme actif pour améliorer l’humeur,  cette molécule a inauguré la grande famille des antidépresseurs dits « tricycliques ». D’autres familles ont suivi, basées sur de subtils réductionnismes de la chimie synaptique : inhibiteurs de la monoamine-oxydase, inhibiteurs de la capture de l’adrénaline ou de la sérotonine.

Plusieurs de ces médicaments, en conformité avec les prévisions théoriques, ont pu modifier temporairement l’humeur ou son expression, mais hélas, aucun d’eux ne s’est montré vraiment plus efficace qu’un placebo pour changer le cours des dépressions à moyen et long terme.

Cet échec vient du fait que la dépression n’est pas une entité isolée. La dépression médicale la mieux établie et la plus fréquente est la phase dépressive de la maladie bipolaire, et il existe des dépressions unipolaires psychotiques plus rares. Dans le premier cas, les antidépresseurs sont inefficaces et dangereux, ils majorent le risque de suicide. Dans le deuxième cas, les antidépresseurs ne sont qu’un traitement d’appoint difficile à évaluer.

Ces médicaments majorent également le risque de suicide quand ils sont utilisés comme traitement de la multitude des « non-maladies » nommées dépressions, particulièrement chez les adolescents.

Les antidépresseurs sont donc des médicaments inutiles et/ou dangereux dans le traitement de la grande majorité des dépressions majeures et mineures. Mais pour ne pas heurter la normativité des médecins et de leurs patients, il convient d’être beaucoup plus concret pour les convaincre que ces propos ne sont ni péremptoires ni répréhensibles.

La meilleure définition d’une dépression médicale grave de type bipolaire ou unipolaire repose sur le risque élevé de suicide. Tout clinicien, soignant un patient à l’humeur dépressive, a donc comme priorité principale d’empêcher le suicide qui est logiquement considéré comme l’échec médical absolu.

La réflexion clinique dans des pathologies de cette complexité où notre méconnaissance reste forte, doit parfois se résumer à regarder les chiffres les plus simples de la façon la plus triviale.

Les antidépresseurs ont été découverts, il y a un demi-siècle, et dans les pays où ils sont utilisés, le taux de suicide a augmenté de 60%.

Avec des chiffres aussi brutaux, comment peut-on encore fabriquer des preuves moléculaires sophistiquées et des discours psychiatriques alambiqués autour de la dépression ? Lorsque le symptôme qui définit à la fois la gravité de la maladie et signe l’échec médical présente une augmentation aussi faramineuse de son incidence.

Je suis toujours stupéfait de la carence épidémiologique dans laquelle baigne la pharmacologie psychiatrique et particulièrement celle du suicide.

Références

Chaussures et psychotropes

dimanche 3 août 2014

C’est l’histoire des deux marchands de chaussures qui découvrent l’Afrique subsaharienne au XIX° siècle. L’un dit que la clientèle potentielle est gigantesque, car tout le monde marche pieds nus, l’autre lui répond que c’est précisément pour cela que ce marché est sans intérêt.

Les professionnels savent qu’il est préférable de suivre la logique du second marchand, car il est difficile de créer une clientèle ou un besoin, alors que développer la science du marketing sur un marché déjà ouvert est moins coûteux et toujours plus rentable.

Les chaussures entraînent une dépendance irréversible comme peuvent en témoigner tous ceux qui ont essayé de s’en passer à l’âge adulte, bien après que leurs parents eussent commis l’irréparable première prescription. Il en est de même pour les benzodiazépines (psychotropes tranquillisants). Je conseille donc aux marchands de benzodiazépines de choisir des pays où le marché est déjà bien ouvert, car l’addiction y est beaucoup plus forte.

Au-delà de cette dépendance, la grande famille des psychotropes (tranquillisants, antidépresseurs, neuroleptiques, thymorégulateurs et psychostimulants) présente l’avantage mercatique d’une promotion interne. Les antidépresseurs aggravent les troubles bipolaires, entraînant alors la prescription de neuroleptiques ou de thymorégulateurs. Les benzodiazépines et les neuroleptiques provoquent des troubles de la cognition et de la vigilance qui favorisent la prescription de divers psychostimulants. Aux Etats-Unis et en France, on constate une tendance croissante à l’association entre antidépresseurs et neuroleptiques.

Cette consommation de psychotropes est largement supérieure dans les pays à bonne couverture médicale et sociale et particulièrement dans les couches de population ayant souscrit à des mutuelles complémentaires. Cette clientèle est particulièrement attractive, car on y constate une augmentation continue de la consommation de psychotropes à tous les âges de la vie. Leur consommation pendant la grossesse pose parfois de réels problèmes de sevrage. Mais cet effet d’entraînement entre différentes générations, soit par addiction initiale, soit par un mimétisme plus tardif lors de l’adolescence, est un nouvel avantage mercatique pour les vendeurs de psychotropes.

Enfin et surtout, l’abondance de consommateurs de psychotropes est une source considérable de données statistiques suffisantes pour obtenir l’autorisation de nouveaux marchés. Ainsi les antidépresseurs sont utilisés dans le sevrage tabagique, les douleurs chroniques et de multiples pathologies réelles ou virtuelles où la clientèle, déjà captive, est très facile à re-capturer.

Bref, ce serait une grosse erreur stratégique de chercher à vendre des psychotropes en Somalie, en Papouasie ou au Burkina-Faso sous prétexte qu’il n’y en a pas encore.

Références