Récemment, un laboratoire investi dans la vente de compléments alimentaires a inondé les médecins de messages pour les informer que la « sarcopénie » était devenue une grande préoccupation de santé publique.
La sarcopénie consiste en une diminution de la masse musculaire. Il ne s’agit ni d’une maladie, ni d’un problème de santé publique, mais d’un état évolutif naturel particulièrement remarquable chez les personnes âgées qui n’ont pas d’activité physique et chez les personnes alitées ou grabataires.
Pour ceux qui ne l’avaient pas encore compris, les muscles grossissent avec l’activité physique et maigrissent en l’absence d’activité physique.
Exactement de la même façon que les os sont atteints d’ostéoporose chez les personnes inactives et n’en sont pas atteints chez les personnes actives (indépendamment des signes radiologiques).
La sarcopénie fait donc partie des multiples symptômes qui caractérisent un syndrome commun plus connu sous le terme de « sénescence » ou de « vieillissement ». Dans ce syndrome fort complexe, la peau se ride, les cartilages se fendent, l’ouïe baisse, les performances cognitives, sexuelles et musculaires diminuent, les artères, les articulations et le cristallin perdent de leur souplesse, le système immunitaire perd de son efficacité, les télomères raccourcissent, les radicaux libres de l’oxygène s’accumulent, les cellules souches disparaissent et la masse osseuse diminue.
Aucune de ces innombrables ignominies ne peut ni ne doit constituer un problème de santé publique dans une démocratie digne de ce nom, bien que le vieillissement soit incontestablement un problème social que ces mêmes démocraties se doivent de gérer avec élégance et empathie.
La sarcopénie n’est donc que la énième maladie du « disease mongering », procédé mercatique consistant à inventer des maladies au nom pompeux pour vendre des médicaments, en laissant entendre, selon un rituel immuable, qu’il s’agit d’un problème de santé publique injustement méconnu.
Comment peut-on faire confiance à des médecins et à un gouvernement qui négligent la sarcopénie ? Que sont les banlieues, l’immigration, le terrorisme, la SNCF ou la dette aux côtés de ce terrible problème de santé publique ?
Trêve d’humour, il nous reste encore à stimuler les médecins et leur ministère pour qu’ils décident enfin si la vieillesse est un processus physiologique ou si elle est la somme de toutes les maladies « que le Ciel en sa fureur inventa pour punir les crimes de la terre ».
En attendant, je me demande de quelle maladie injustement négligée est mort Jean de La Fontaine ?