Le dépistage anténatal devient de moins en moins traumatisant. Le nouveau progrès est celui de l’analyse directe de l’ADN sanguin maternel pour déceler les anomalies de l’embryon.
Malgré quelques ultimes réticences éthiques, évoquant un eugénisme médical et technologique, on peut logiquement s’attendre à voir disparaître progressivement la trisomie, la mucoviscidose et d’autres graves maladies génétiques. Nul ne peut réellement s’en plaindre.
Après avoir identifié toutes les maladies chromosomiques et monogéniques, les fulgurants progrès de la génomique permettent désormais d’établir des séries de mutations et polymorphismes génétiques positivement corrélés à de nombreuses pathologies. Pour l’instant, ces analyses complètes de génome (GWAS) n’ont aucun impact clinique. Les interminables listes de mutations associées à l’Autisme, au Parkinson ou à l’Alzheimer s’apparentent plus à un fiasco qu’à un progrès de la génétique. Le polygénisme est devenu tel que chaque facteur perd progressivement du poids par rapport aux facteurs environnementaux, souvent eux-mêmes nombreux et mal connus.
Malgré cela, le marché de ces analyses génomiques, promu par des gourous de l’immortalité, est très prometteur. Les ministères qui en rappellent régulièrement l’inutilité et les dangers des deux côtés de l’Atlantique, ne font aucun poids face à la puissance mercatique d’un géant tel que Google qui en est l’un des pionniers. (Notons au passage que l’espérance de vie est plus faible, et diminue, dans les pays où ces marchés existent depuis longtemps !)
Amusons-nous alors à faire de la mercatique fiction. Pour sortir de l’imbroglio du polygénisme, la technique commerciale de ces « génomeurs » est de choisir arbitrairement l’une des mutations pour la métamorphoser en un déterminant majeur de la maladie afin de proposer un test. L’histoire de la détection de l’autisme est la plus révélatrice de ce genre de manœuvre.
Il ne fait aucun doute que l’on proposera un jour des packs de dépistage néonatal associant les grandes maladies monogéniques et le génome complet. Même sans remboursement, il y aura beaucoup de clients. On fournira indifféremment aux parents, le risque de mucoviscidose ou d’Alzheimer de leur futur enfant. On leur proposera un petit supplément pour la longueur des télomères supposée indiquer l’espérance de vie.
Les parents dont l’enfant aura un risque de développer une maladie d’Alzheimer avant soixante-dix ans décideront-ils d’un avortement thérapeutique ? Ils auront certainement besoin du soutien d’un comité d’éthique pour savoir si l’intérêt de la vie après cet âge justifie ou non de sacrifier les soixante-dix ans qui précèdent.
Enfin, devant le risque insensé d’avoir des télomères trop courts, il faut envisager soit une stérilisation définitive, soit de ne jamais faire d’analyse génomique !