Les quatre premiers piliers de l’éthique médicale sont la bienfaisance, le respect du libre-arbitre, l’équité et la non-nuisance.
La bienfaisance va de soi, elle suit son cours biologique et ne nécessite aucun commentaire particulier.
Le respect du libre arbitre du patient suppose qu’il ait eu au préalable une information éclairée. Il faut pour cela que le médecin dispose lui-même d’une information éclairée et impartiale, ce qui est de plus en plus difficile avec la complexité des pathologies abordées, les biais des études et les conflits d’intérêts. Cependant, malgré de nombreuses « affaires », nous constatons que la situation actuelle de l’information semble globalement meilleure qu’il y a 10 ou 20 ans. Encore un effort…
L’équité, dans un pays comme le nôtre où la protection sociale est encore excellente, ne pose pas de problème majeur. Mais il nous faut douloureusement constater que depuis quelques années, l’inégalité des soins suit la progression des inégalités sociales, même si c’est avec un certain décalage. L’avenir nous paraît, hélas, encore plus sombre…
Quant à la non-nuisance, il est quasi impossible d’en faire la critique ou le bilan. Ce thème pose en effet toutes les questions que suscite notre médecine technologique dans une société libérale complexe. Imaginons un médecin libéré de toute contrainte économique devant un patient bien informé prêt à accepter une grande nuisance avec la garantie scientifique d’un bénéfice quantitativement et qualitativement supérieur à cette nuisance. Autant dire que la situation est utopique et que le « primum non nocere » de notre cher Hippocrate s’éloigne sans espoir de retour.
C’est pourquoi la médecine moderne a rajouté à ces quatre piliers classiques, les deux principes éthiques de la science que sont la suprématie des preuves et le principe de réfutabilité. La mise en œuvre de ces deux apports majeurs n’a malheureusement pas permis de diminuer la complexité des problèmes d’éthique médicale.
Il existe peut-être un « digest » destiné aux praticiens de terrain, qui n’ont pas le temps de relire leur cours d’éthique avant chacun de leurs nombreux actes. Une sorte de « truc » de l’éthique consistant à évaluer rapidement la conséquence pratique immédiate d’une première étape. En voici quelques exemples. Une analyse ou un test ne sont-ils pas inutiles s’ils ne peuvent déboucher que sur un autre test ? Quel est l’intérêt d’un scanner dont on sait déjà qu’il ne modifiera pas la logique décisionnelle ? Un mot diagnostique est-il nécessaire s’il n’existe aucun traitement ? Un doute peut-il être immédiatement émis si la probabilité est infinitésimale ?
Une sorte d’éthique conséquentialiste fruste basée uniquement sur l’étape suivante.