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Que sera l’Histoire de la médecine ?

lundi 29 août 2016

Le travail des historiens de la médecine consiste à identifier les grandes découvertes qui ont durablement modifié les croyances et les pratiques.

Certaines pages de l’Histoire comme l’inoculation de la vaccine par Jenner, la description de la circulation sanguine par Harvey ou l’utilisation des rayons X pour voir l’intérieur du corps font l’unanimité des historiens.

Pour d’autres évènements, l’historicité peut faire débat. Par exemple, la méthode numérique du Dr Louis qui démontra l’inutilité de la saignée dans les pneumonies, est rarement relatée comme un fait majeur, bien qu’elle ait inauguré le passage de l’empirisme à la preuve en thérapeutique.

Au cours du XX° siècle, la transition d’une médecine de la demande à une médecine de l’offre n’a eu aucun relief historique. Le fait de chercher des maladies chez des sujets sans symptômes, n’a pas été noté comme un évènement médical, car cette tendance progressive a été noyée dans la transition d’une économie de la demande à une économie de l’offre. L’augmentation des analyses, mesures et radiographies pratiquées chez des sujets sains, encouragés à consulter, a grossièrement suivi les courants économiques et sociaux du XX° siècle.

Mais devant les nouveaux et réels dangers sanitaires de cette surmédicalisation, certains médecins, de plus en plus nombreux, essaient enfin de théoriser le soin. On commence à organiser des séminaires, indépendants de l’industrie et des ministères, pour tenter de comprendre comment la médecine a progressivement délaissé les malades pour s’occuper des bien-portants et se mettre au service de l’économie.

Verra-t-on un jour une nouvelle inversion de tendance dont l’historien devra discerner les évènements marquants ? Deux faits récents, passés presque inaperçus, deviendront peut-être des faits historiques majeurs.

Pour la première fois dans l’histoire de la médecine, il a été prouvé qu’un dépistage de cancer constituait une « perte de chance » (en jargon statistique). Les groupes dépistés du cancer de la prostate ont une légère perte de quantité/qualité de vie par rapport aux groupes non dépistés. L’historien notera que c’était la première fois que des ministères de santé publique ont officiellement déconseillé un dépistage.

Un fait plus récent devrait avoir encore une plus grande portée historique. Des endocrinologues, cancérologues et anatomo-pathologistes viennent de demander le déclassement d’un cancer de la thyroïde. La variante folliculaire du carcinome thyroïdien, qui représente 20% des cancers de la thyroïde, ne sera bientôt plus une tumeur maligne, car ce « cancer » se comporte toujours, cliniquement, comme une tumeur bénigne.

Ces deux faits seront probablement des évènements historiques dans la définition clinique du cancer…

Un jour, peut-être, l’Histoire racontera comment la médecine s’est remise à soigner de vrais malades…

Références