Le 5 septembre 2016, une information a fait la une des médias après le décès de deux grands prématurés, car une première corrélation avait été établie avec le lait maternel en provenance du lactarium de l’hôpital Necker, que tous deux consommaient.
La bactérie (Bacillus cereus) supposée responsable n’avait cependant pas encore été retrouvée dans le lait du lactarium et les résultats étaient attendus une semaine plus tard…
Il aurait été logique que ces résultats, positifs ou négatifs, fassent encore la une de tous les médias. Or il n’en a rien été.
Cette anecdote, entre mille, est un exemple emblématique de la démesure de l’information sanitaire et plus particulièrement en matière d’infectiologie. L’épidémie de SIDA n’avait pas été prévue et toutes les épidémies que le XX° siècle a redoutées ont été insignifiantes ou n’ont pas eu lieu.
De la même manière, les annonces de recherches en cours et de miracles thérapeutiques sont suivies d’effets concrets environ une fois sur cent.
En matière sanitaire, la sérénité fait toujours défaut, on souffle l’espoir et la terreur avec la même démesure.
Mais, dans le cas du lactarium, il faut regretter en plus une criante asymétrie de l’information dont les répercussions sanitaires ont un caractère bien plus concret. Trente ans se sont écoulés entre les premières alertes sur les dangers de malformation liés à la Dépakine et leur médiatisation. Autant d’années entre les alertes sur les dérivés amphétaminiques (dont le médiator) et l’information au grand public. Même constat pour tous les médicaments de l’obésité, qui ont tous été retirés du marché bien longtemps après leurs dégâts sanitaires.
Le lait maternel du lactarium Necker n’a pas eu la chance de bénéficier de cet étonnant silence médiatique. Il a été présumé coupable, avant la moindre preuve. Preuve qui n’arrivera peut-être jamais, car il faut rappeler avec une triste lucidité que les grands prématurés sont très fragiles et que la cause de leur mort est généralement plurifactorielle.
La grande clémence envers les médicaments détonne encore plus quand on la compare avec cet acharnement contre le lait maternel.
Pauvre lait maternel, il n’avait pas besoin de cette contre-publicité dans notre pays où il est très difficile de le réhabiliter.
Les journaux devraient pourtant ressasser que le lait maternel est le plus sûr moyen de diviser par six à dix les infections et hospitalisations du nourrisson, et qu’à ce jour, aucun médicament n’a réussi à faire aussi bien, même quand il avait fait la une.