Archive pour mars 2024

Le dysgénisme face à la vertu

dimanche 24 mars 2024

Galton, créateur du concept d’eugénisme voulait améliorer l’humanité en interdisant la procréation aux faibles et malades supposés porteurs de mauvais gènes. Quelques pays s’y sont essayés, pour leur plus grande honte et leurs plus gros remords. L’Allemagne nazie a porté l’eugénisme à son paroxysme en éliminant directement les porteurs sans vérifier leurs gènes qu’elle avait décrété nuisibles.

À l’opposé, comme son préfixe l’indique, le dysgénisme consiste à sélectionner de mauvais gènes. Le terme a été créé par un naturaliste américain qui pensait que la première guerre mondiale en tuant les hommes les plus valides, allait sélectionner les invalides restés à la maison.

La médecine est accusée de dysgénisme puisqu’en assistant et en soignant les plus faibles, elle leur permet assez souvent d’atteindre la maturité sexuelle et l’âge de la procréation. Par exemple, la procréation médicalement assistée serait une façon de permettre la diffusion de gènes de la stérilité. Ou encore la pratique des césariennes risquerait de favoriser la reproduction de femmes au bassin étroit, à l’encontre de la sélection naturelle.

De façon moins fallacieuse et plus problématique, les soins à des personnes atteintes d’une maladie monogénique, comme la mucoviscidose dont le gène délétère est connu, leur permet désormais de largement dépasser l’âge de la maturité sexuelle. Ce dysgénisme médical est compensé par le dépistage anténatal de cette maladie suivi d’une proposition d’interruption de grossesse. On peut alors reprocher à la médecine d’être à la fois dysgéniste et eugéniste, mais c’est la rançon d’un progrès que la société lui réclame.

Il ne fait aucun doute que les thérapies géniques, les protéines recombinantes ou les ciseaux moléculaires permettront à des porteurs de maladies génétiques rares d’accéder à l’âge adulte et à des demandes de procréation que la médecine devra tenter de satisfaire au nom de l’égalité des chances. Le dépistage anténatal deviendrait alors impératif, voire obligatoire.

La médecine n’a pas de projet social, et personne ne le lui demande. La technologie n’en a pas davantage. Seul le politique peut interdire, imposer ou réglementer. Quand bien même le politique aurait compris la sélection naturelle, toutes ses décisions seraient contestables et contestées pour des raisons d’éthique ou d’équité.

SJ Gould avait bien compris cette impasse politique et anthropologique lorsqu’il disait déjà en 1995 : « Pourquoi faudrait-il qu’un processus qui a réglé l’histoire des êtres vivants au long de 3,5 milliards d’années sans mettre en œuvre de système éthique explicite fournisse toutes les réponses à une espèce qui est apparue il y a une seconde seulement au niveau des temps géologiques, et qui a ensuite changé les règles en introduisant d’intéressants concepts nouveaux tels que la justice et la vertu ».

Références

Futurs bilans du Covid19

mardi 12 mars 2024

Le temps n’est pas encore venu pour dresser un bilan global de la pandémie de Covid19 et des mesures prises pour la contrôler, car l’épidémiologie est une science lente. Il est probable que ce bilan ne puisse advenir tant que survivront ceux qui en ont orchestré la médiatisation et les politiques sanitaires. Thomas Kuhn a montré que les théories et concepts ne disparaissent totalement qu’après le décès de leurs maîtres.

Néanmoins, on peut déjà affirmer que la mortalité par millions d’habitants a été légèrement supérieure à celle de la grippe de 1957 et 20 fois moindre que celle de la grippe de 1918. Si l’on considère l’âge moyen des décès (environ 80 ans), la perte d’années de vie est plus faible que pour la grippe de 1957.

L’efficacité des mesures prises pour contrôler cette épidémie, (confinement, fermeture des écoles, port du masque, désinfection des mains), sont très difficiles à évaluer. Il est probable qu’elles ont étalé la mortalité sans la diminuer globalement dans un première période. Nous en saurons mieux lorsque nous pourrons réaliser des études comparatives entre pays, études qu’aucune institution ne semble disposée à mettre en place. Pour l’instant, la Suède, montrée comme un pays laxiste, n’a subi ni explosion de sa mortalité, ni recul de son espérance de vie lors des dernières années.

Quant aux vaccins, leur disponibilité très rapide a probablement bénéficié à quelques-uns de ceux qui auraient pu décéder au cours de cette deuxième période. Pour l’instant les données les plus solides sur la vaccination semblent confirmer une efficacité sur les formes graves sans diminuer la circulation du virus ni le nombre de cas. En revanche, après plus de 13 milliards de doses administrées dans le monde, nous n’avons jamais disposé d’une base de données aussi importante et aucun vaccin n’avait jamais été observé d’aussi près. Cela permet d’affirmer que les effets indésirables sont rares (myocardites), mais certains peuvent les juger excessifs en regard d’une efficacité de moins de 50%, ce qui est faible pour un vaccin.  

Par ailleurs, de nombreuses études se sont intéressées à la morbidité et à la mortalité, non pas liées directement au virus, mais aux mesures prises pour le contrôler. Ces études sont souvent empreintes d’idéologie, mais en sélectionnant celles qui ont un niveau de preuve acceptable, on peut dégager quelques faits. La sédentarité a majoré les taux d’obésité, particulièrement chez les plus jeunes. La consommation de psychotropes et de drogues illicites a significativement augmenté, de même que les violences conjugales. Les études sur les effets du port du masque chez les enfants sont polémiques et contradictoires, la majorité penchent vers des effets délétères à moyen terme. Seule la désinfection des mains est plébiscitée et innocentée de tout effet indésirable.

Les plus sérieux bilans du Covid seront plutôt du ressort de sociologues ou d’historiens. Il en va ainsi de l’épidémiologie.

Références