Archive pour septembre 2016

Migraine d’un économiste

dimanche 25 septembre 2016

Ce matin-là, il sifflote, la vie est plutôt belle.

Dans sa boîte aux lettres, pourtant recouverte d’une étiquette interdisant la publicité, un courrier l’invite à dépister un éventuel cancer silencieux du côlon. Il déchire la lettre et démarre son véhicule où l’autoradio entame une musique qui lui redonne envie de siffloter… Tout à coup, un « spot » l’avertit qu’il souffre peut-être d’une dépression sans le savoir, car il existe des dépressions dites « masquées » dont il faut se méfier. Incroyable ! Il sourit à l’idée que les dépressions peuvent être aussi masquées que les publicités. Un vrai carnaval !

Cela lui rappelle son ami, visiteur médical, marchand d’antimigraineux, affirmant que l’on pouvait avoir des migraines sans le savoir ! Il avait alors brocardé qu’en cas de migraines, il choisirait celles-ci !

L’autoradio diffuse maintenant une émission sur l’hyperactivité infantile. Le spécialiste interrogé insiste sur le fait que les médecins et les parents sous-estiment ce problème.

Lorsqu’il arrive sur son lieu de son travail, il ne sifflote plus. Un dernier spot l’interpelle : « Si dans la rue, vous voyez quelqu’un avec la bouche tordue, n’hésitez pas à appeler le SAMU, car c’est peut-être un accident vasculaire cérébral. » De tels propos ne s’inventent pas. Il éclate de rire : « voilà, je vous appelle parce-que j’ai vu une dame avec la bouche tordue. »…

En faisant ses courses après sa journée de travail, il se surprend à regarder les étiquettes des produits, alors qu’il ne le fait jamais. Il y est question de protection contre les mauvaises graisses. Une étiquette plus savante vante un produit qui rallonge les télomères ; il a déjà entendu parler de ces trucs-là, et il suppute qu’il doit être préférable d’avoir de plus longs télomères.

Enfin arrivé chez lui, il apprécie sa chance d’avoir un appartement avec une belle vue sur Paris. Tiens, la tour Eiffel est décorée de rose. Que se passe-t-il ?

Mais tu sais bien que c’est « octobre rose », le mois de l’incitation au dépistage du cancer du sein lui répond sa féministe de conjointe. Mais rassure-toi, les hommes ne sont pas exclus, car le mois prochain c’est « movember » (moustaches de novembre) pour promouvoir le dépistage du cancer de la prostate… Non, non, elle n’a pas inventé cela non plus…

Au fait, j’ai vu le médecin de ma mère aujourd’hui, il me dit qu’elle pourrait avoir un déficit cognitif, c’est bizarre, je ne m’en suis pas aperçu. Et toi ?

Moi non plus, mais c’est peut-être parce-que nous avons un déficit cognitif ?

Décidément rien ne l’empêchera de rire aujourd’hui. Sauf peut-être la lecture de son journal économique qui lui apprend que le marché de la santé représente 11,6% du PIB. Son cerveau pédale alors à toute allure… Comment la part de PIB perdue par la baisse du moral des ménages, peut être regagnée par le surplus de marché sanitaire qu’engendre la propagande alarmiste qui baisse à son tour le moral des ménages ?

Un vrai casse-tête à donner une migraine non masquée.

Références bibliographiques

Orlistat au Gabon

lundi 12 septembre 2016

Une fois de plus, on découvre que les effets secondaires d’un médicament ont été dissimulés avant même sa mise sur le marché, et que la dissimulation a continué pendant des années, malgré les évidences cliniques du rapport bénéfices/risques négatif.

Une fois de plus, il s’agit d’un médicament contre l’obésité. Pourtant, dans ce domaine, la vigilance devrait être particulièrement élevée, puisqu’à ce jour, malgré un siècle de tentatives de l’industrie pour soulever ce marché prometteur, pas une seule molécule n’a montré de rapport bénéfices/risques favorable, et tous les médicaments ont fait l’objet de scandale ou de retrait du marché.

Avant de fustiger la désinvolture des autorités, il faut comprendre que celles-ci ne font qu’appliquer la loi. Cette loi exige des essais cliniques avant autorisation et si les résultats sont favorables, les ministères ne peuvent pas s’opposer à la commercialisation.

Cette vitrine impeccable cache cependant un problème récurrent. La méthodologie, la conduite, la sélection et la publication de ces essais cliniques sont sous l’entière responsabilité du laboratoire fabricant, car aucun gouvernement ne peut évidemment disposer des moyens logistiques et financiers pour assurer ces tâches.

Certes, cela est valable pour toutes les industries et tous les objets du commerce, mais il y a de grosses différences selon les secteurs. Il est en effet très difficile de vendre un avion qui ne vole pas ou un couteau qui ne coupe pas, alors qu’il est extrêmement facile de vendre un médicament inefficace ou dangereux, en raison de la prépondérance de son contenu immatériel (rêve, espoir, placebo, suggestibilité). Pour réussir, il suffit simplement d’organiser correctement le marketing de cette immatérialité.

Les acquéreurs d’espoir en gélule n’ont pas de raisons d’être moins nombreux que les électeurs qui s’enflamment pour un discours populiste ou ceux, encore plus nombreux, qui accordent quelque crédit à une promesse électorale ou fiscale. Le marketing de l’immatérialité étant beaucoup plus élaboré en politique qu’en pharmacologie.

Ce nouveau scandale pharmaceutique coïncide facétieusement avec l’actualité au Gabon où le clan Bongo conserve le pouvoir depuis un demi-siècle au mépris des règles démocratiques les plus élémentaires. Omar Bongo, père de l’actuel président, s’étonnant de la défaite électorale du président sénégalais en 2000, aurait alors dit avec cynisme pharmacologique et bonhomie politique : « Comment peut-on perdre une élection que l’on organise soi-même ? »

Références

Orlistat au Gabon

jeudi 8 septembre 2016

Une fois de plus, on découvre que les effets secondaires d’un médicament ont été dissimulés avant même sa mise sur le marché, et que la dissimulation a continué pendant des années, malgré les évidences cliniques du rapport bénéfices/risques négatif.

Une fois de plus, il s’agit d’un médicament contre l’obésité. Pourtant, dans ce domaine, la vigilance devrait être particulièrement élevée, puisqu’à ce jour, malgré un siècle de tentatives de l’industrie pour soulever ce marché prometteur, pas une seule molécule n’a montré de rapport bénéfices/risques favorable, et tous les médicaments ont fait l’objet de scandale ou de retrait du marché.

Avant de fustiger la désinvolture des autorités, il faut comprendre que celles-ci ne font qu’appliquer la loi. Cette loi exige des essais cliniques avant autorisation et si les résultats sont favorables, les ministères ne peuvent pas s’opposer à la commercialisation.

Cette vitrine impeccable cache cependant un problème récurrent. La méthodologie, la conduite, la sélection et la publication de ces essais cliniques sont sous l’entière responsabilité du laboratoire fabricant, car aucun gouvernement ne peut évidemment disposer des moyens logistiques et financiers pour assurer ces tâches.

Certes, cela est valable pour toutes les industries et tous les objets du commerce, mais il y a de grosses différences selon les secteurs. Il est en effet très difficile de vendre un avion qui ne vole pas ou un couteau qui ne coupe pas, alors qu’il est extrêmement facile de vendre un médicament inefficace ou dangereux, en raison de la prépondérance de son contenu immatériel (rêve, espoir, placebo, suggestibilité). Pour réussir, il suffit simplement d’organiser correctement le marketing de cette immatérialité.

Les acquéreurs d’espoir en gélule n’ont pas de raisons d’être moins nombreux que les électeurs qui s’enflamment pour un discours populiste ou ceux, encore plus nombreux, qui accordent quelque crédit à une promesse électorale ou fiscale. Le marketing de l’immatérialité étant beaucoup plus élaboré en politique qu’en pharmacologie.

Ce nouveau scandale pharmaceutique coïncide facétieusement avec l’actualité au Gabon où le clan Bongo conserve le pouvoir depuis un demi-siècle au mépris des règles démocratiques les plus élémentaires. Omar Bongo, père de l’actuel président, s’étonnant de la défaite électorale du président sénégalais en 2000, aurait alors dit avec cynisme pharmacologique et bonhomie politique : « Comment peut-on perdre une élection que l’on organise soi-même ? »

Références

Le grand jeu des caractères sexuels secondaires

samedi 3 septembre 2016

L’innovation de la sexualité a été une grande étape dans l’Histoire de la vie dont l’unique but est de se reproduire incessamment. Puis, pour optimiser cette reproduction, l’élaboration des caractères sexuels secondaires a permis à chaque sexe d’évaluer les qualités du partenaire et les chances de succès pour la progéniture.

Chez Homo sapiens, les aspects culturels ont ajouté plusieurs degrés de complexité sur ces caractères secondaires, agissant dans des directions parfois opposées.

Certains leurres comme le rouge à lèvre ou le vernis à ongles n’ont probablement pas eu de répercussion notable, tandis que d’autres comme les corsets pour accentuer la poitrine ou les crinolines pour valoriser la taille du bassin ont pu provisoirement tromper les géniteurs sur les qualités de la future parturiente.

Lorsque dans certaines sociétés paysannes ou royales, les appariements, arrangés à des fins territoriales ou politiques, n’ont plus reposé sur la sélection sexuelle, il n’a fallu que quelques générations pour qu’apparaissent de graves dégénérescences, dont l’exemple européen le plus caricatural est celui des Habsbourg.

L’amélioration des moyens de transport et les voyages intercontinentaux ont permis d’élargir la palette des attraits, favorisé l’exogamie et assuré un meilleur brassage génétique.

Les parfums et, plus récemment, les déodorants et la pilule contraceptive, pervertissent les odeurs dont on connaît désormais le rôle majeur pour éviter les similitudes immunitaires.

Enfin, la sélection par les nouveaux moyens de communication, comme internet, est une loterie aveugle dont il est impossible de prévoir l’impact sur la qualité des appariements.

L’investissement parental est identique chez toutes les femmes, alors que celui des hommes est souvent corrélé à la certitude de paternité. Pour augmenter cette certitude, toutes les cultures et toutes les époques ont imaginé des moyens allant des plus barbares, comme l’infibulation ou la ceinture de chasteté, aux plus légères, comme divers voiles pour dissimuler les formes, la chevelure ou le visage.

Mais, lorsqu’une femme est appariée à un géniteur défaillant, aucune contrainte culturelle ne saurait entraver sa quête de procréation. Il suffit d’un voile impeccablement ajusté pour accentuer la symétrie du visage dont on sait qu’elle est un attracteur puissant. Il suffit de voir un avant-bras pour évaluer l’épaisseur de la graisse sous-cutanée dans tout le reste du corps. Et lorsqu’un large voile dissimule les hanches ou les seins, il suffit de le mouiller habilement pour que les formes apparaissent avec toutes leurs promesses vitales. Et ces formes ont assurément plus d’authenticité qu’avec la crinoline ou la web caméra.

Références