Lorsque les historiens de demain jugeront la médecine d’aujourd’hui, ils relèveront le phénomène de « l’extension des indications » comme le plus marquant de la sociologie sanitaire des XX° et XXI° siècles. Et si l’épistémologie du soin était un jour enfin introduite dans l’enseignement des facultés de médecine, son objet principal serait certainement l’étude des ajustements entre risque de surmédicalisation et risque de négligence.
L’extension des indications a concerné et concerne encore tous les secteurs du soin. L’hypertension est traitée dix fois trop souvent après 40 ans et cent fois trop souvent après 70 ans. L’appendicectomie a été réalisée cent fois trop souvent à tort jusqu’aux années 1980. La quasi-totalité des amygdalectomies, adénoïdectomies, hystérectomies ont été abusives et inutiles. Les antidépresseurs et benzodiazépines sont mille fois trop prescrits. Les césariennes trois fois trop fréquentes, les déclenchements d’accouchement trente fois trop. Plus de la moitié des dépistages, bilans et imageries diverses conduisent à des diagnostics abusifs. Les antibiotiques sont dix fois trop prescrits. La crainte de la rarissime dyspnée laryngée provoque le traitement corticoïde de 50% des toux de nourrissons fébriles. Les anti-inflammatoires et antalgiques morphiniques sont cent fois trop prescrits. J’arrête là cette liste où j’ai volontairement minimisé les chiffres pour ne pas risquer une trop forte marginalisation.
La seule défense acceptable d’un médecin contre cette diatribe, serait celle du principe de précaution. Défense bien légère qu’un habile avocat retournerait contre lui pour dévoiler son incompétence clinique.
Récemment, suite à la proposition aberrante et heureusement vite oubliée d’apprendre aux étudiants l’examen gynécologique sur des patientes anesthésiées, certains sont allé jusqu’à évoquer l’accusation de viol.
J’ai la naïveté pour supposer et l’expérience pour savoir que les examens gynécologiques sur patiente anesthésiée sont pratiqués pour des raisons cliniques, et ont toujours lieu devant les membres de l’équipe chirurgicale qui entoure ces patientes.
Les juges, interpellés sur cette question du « viol symbolique », ont eu la sagesse de répondre qu’ils ignoraient ce qu’était un viol symbolique, mais par contre qu’ils avaient la définition pénale du viol : « tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, commis sur la personne d’autrui par violence, contrainte, menace ou surprise ».
Si le majeur et l’index sont une « quelque nature » et si l’anesthésie est une « surprise », je n’ose pas penser ce qui se passerait si les juges se mettaient à pratiquer l’extension des indications judiciaires avec la même frénésie que les médecins pratiquent l’extension des indications médicales !
Mots-clefs : anesthésie, formation, gynécologie, médecins, viol
S’il y a consentement préalable de la patiente, aucun problème.
Lisons, relisons, encourageons à lire « Knock » de Jules Romain. Mieux, inscrivons le au programme des études médicales… mais je crains qu’il ne soit déjà trop tard et que le Dr Knock ne soit devenu l’exemple à suivre et Parpallet un vieux c…
Cette définition du viol devrait être complétée par la caractérisation du but du violeur: sadisme, volonté d’humilier, de rabaisser, de traiter la femme (ou l’homme) comme un objet et/ou d’obtenir une jouissance physique (orgasme) ou psychique (sadisme).
On verrait ainsi que le TV ne peut en aucun cas être considéré comme un viol.