Les médecins de l’ancienne Egypte considéraient l’hystérie féminine et les sorcelleries qui en émanaient, comme le résultat d’une errance de l’utérus. Par ailleurs, l’ibis, grand destructeur de sauterelles était un oiseau sacré. On comprend alors pourquoi les papyrus médicaux pharaoniques stipulaient de faire entrer par la vulve les fumées d’un ibis de cire placé sur des charbons ardents pour faire revenir l’utérus à sa place. On ignore cependant le nombre de brûlures vulvaires secondaires à cette thérapeutique.
Avec un sens aigu de l’observation, les médecins du XVII° siècle, avaient remarqué que les femmes en cours de grossesse n’avaient plus de règles. Ainsi, lorsqu’une femme enceinte était frappée de quelque fièvre ou fatigue soudaine, l’Académie, déduisant qu’elle devait être « engorgée » par tout ce sang accumulé au fil des mois, conseillait de pratiquer la saignée. La pratique a persisté jusqu’en 1850 et nous ignorons toujours le nombre de femmes et d’embryons victimes de cette théorie.
Plus récemment, dans l’Occident des années 1970, la ménopause, indemne de sorcellerie et d’engorgement sanguin, a été plus savamment considérée comme une maladie, et soignée comme telle. La théorie était aussi sexiste et farfelue que les deux précédentes, mais les progrès statistiques ont ici permis de constater l’augmentation considérable de cancers du sein qui en a découlé.
Aujourd’hui, les progrès des sciences biomédicales et de la statistique, nous permettent de découvrir un nombre de plus en plus importants de maladies auto-immunes dont la plupart touchent essentiellement les femmes. Cette différence peut avoir une composante hormonale, mais elle est plus probablement due aux ajustements immunitaires que la présence d’un embryon « à moitié étranger » impose à sa mère.
En raison, de leur caractère cyclique et de la très grande variété et variabilité de leurs symptômes, ces maladies ont été longtemps classées comme psychosomatiques, et certaines le sont encore. Le mal étant décrété « dans la tête » et non dans le système immunitaire, les femmes ont été victimes des abus thérapeutiques de cette catégorisation psychique. Opiacés, tranquillisants et antidépresseurs continuent d’emprisonner nombre de femmes dans l’addiction.
L’importante féminisation actuelle du corps médical pourrait être un moyen d’atténuer le sexisme lié à notre ignorance biologique ? J’en cultive l’espoir, et j’encourage vivement les plus diplômées et les plus expérimentées de mes consœurs à y travailler avec la rigueur scientifique exigée pour un tel sujet. Et je propose, avec toute la neutralité de genre qui convient, de les accompagner dans ce passionnant exercice clinique.
Mots-clefs : maladies auto-immunes, sexisme