Médecine libérale en démocratie

Déclarer l’effet indésirable d’un médicament au centre de pharmacovigilance est certainement une manœuvre sournoise contre l’industrie pharmaceutique. De la même façon qu’accuser un membre du clan Le Pen de propos racistes, d’emplois fictifs ou de détournement d’argent ne peut relever que de basses manœuvres politiques. Demander le déremboursement d’un médicament inutile est de la pharmacophobie, exactement comme expulser un musulman qui n’a pas payé son loyer est de l’islamophobie. Oser dire qu’un médicament est dangereux est du radicalisme anti big-pharma, exactement comme condamner Israël pour ses frappes sur le Liban est de l’antisémitisme.

Refuser du cannabis à une femme pour traiter les nausées du premier trimestre de grossesse est tyrannique et lui conseiller vivement l’allaitement maternel est machiste. Dire à une femme de se dévêtir pour un examen clinique est un conformisme clinique désuet et lui proposer un frottis vaginal est assimilable à du harcèlement sexuel. Demander à une femme d’enlever son voile relève d’un laïcité obtuse, comme lui dire que son CV ne convient pas au poste recherché relève du sexisme.

S’intéresser à la dermatologie sur peau noire est aussi raciste que mettre en garde à vue un dealer noir. Se passionner pour la génétique des populations est du fascisme. S’en désintéresser est un mépris pour les minorités.

Un praticien qui met en doute l’efficacité des dépistages médicaux est un obscurantiste. Lorsqu’il s’interroge sur la télémédecine, le transhumanisme et l’intelligence artificielle, il révèle un archaïsme saugrenu, et lorsqu’il en fait la promotion, c’est qu’il s’est béatement inféodé aux GAFAM.

Refuser une chirurgie de réassignation sexuelle à un adolescent de 16 ans est transphobe, comme avoir des réserves sur la GPA est homophobe.

Promouvoir la marche à pied s’apparente à une écologie punitive. Minimiser un risque épidémique est de l’inconscience, alors qu’évoquer une maladie environnementale est catastrophiste. Exiger tel vaccin est du fondamentalisme, mettre en doute l’efficacité de tel autre est du complotisme.

Question subsidiaire : les médecins qui ont eu le courage de refuser une benzodiazépine à quelqu’un qui ne dormait pas ou de la morphine à quelqu’un qui souffrait d’arthrose étaient-ils des prophètes ou des barbares ?

Exercer la médecine générale dans une démocratie libérale est une chance et un honneur. Cela expose néanmoins à de nombreuses et insolites critiques qu’il faut apprendre à relativiser.

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