Le mot épidémie a encore frappé

Une épidémie (du grec au-dessus du peuple) est la propagation rapide d’une maladie infectieuse connue ou inconnue qui frappe en un même lieu un grand nombre de personnes. Comme les lois, les définitions disposent d’une marge d’interprétation. Le terme « rapide » est sujet à discussion : quelques jours, semaines ou mois. Le même lieu peut être une école, une vallée, une caserne ou une ville. Le terme « pandémie » est utilisé quand il s’agit du monde entier, alors que les termes « épiscolie » ou « épipolis » n’existent pas. Mais c’est assurément « grand nombre » qui est sujet à la plus grande variété d’interprétations. La raison mathématique impose de parler en pourcentage : cinq écoliers dans un établissement de 1000 élèves est plus important que deux millions de personnes dans le monde. Le record de tous les temps est évidemment celui de la peste qui a décimé 30% de la population de tout un continent. Record indépassable, espérons-le, qui a diabolisé le mot épidémie dans l’inconscient collectif de toutes les générations suivantes. Personnellement, il m’est agréable de savoir que je suis un descendant de ceux qui ont survécu assez longtemps pour avoir eu le temps de se reproduire. Cela me rassure quelque-peu sur la qualité de mon système immunitaire.

Les infectiologues et épidémiologistes, par nature plus raisonnables, utilisent plus volontiers le terme « émergence » qui se définit comme une infection nouvellement apparue dans une population ou qui a déjà existé mais dont l’incidence ou la répartition géographique augmente rapidement. Définition plus modeste par ses termes « incidence » et « répartition ». Quant à l’adverbe « rapidement », elle sous-entend plutôt des mois ou années.

Entre 1940 et 2004, on a dénombré 335 émergences dans le monde et plus de cent au XXIème siècle. Quant aux infections humaines véritablement nouvelles, la moyenne est de cinq par an. J’ignore pourquoi le grand public n’a connaissance que d’une partie infime de ces émergences, alors que d’autres occupent la une des médias pendant des mois. Cette question de sociologie est trop complexe pour moi. Le seul facteur que j’ai réussi à noter concerne les annonces de l’OMS. Il semble que lorsque cette institution internationale décide d’alerter sur une émergence, tous les pays sans exception mettent leurs ministères au pas quel que soit le lieu de cette émergence. Cela prouve au minimum que nos dirigeants et leurs experts attitrés, n’ayant plus ni opinion, ni autonomie de décision, se soumettent aux médias et aux aléas des précautions de quelques influents leaders de l’OMS. Sans pouvoir présumer de l’avenir de cette deuxième émergence de mpox virus, nous pouvons au minimum affirmer qu’elle s’inscrit dans une très longue liste familière aux épidémiologistes. Et lorsque j’ai entendu une radio parler d’épidémie en Europe parce qu’il y avait eu un cas, j’ai réalisé que la catastrophe sémantique nous menaçait plus que la catastrophe infectieuse.  

Référence

Un commentaire sur “Le mot épidémie a encore frappé”

  1. Guérinier Jean Marie dit :

    Cher confrère,
    le mot épidémie est en effet galvaudé et ainsi entrainer une épidémie d’angoisse chez les moins informés…
    L’important dans notre société actuelle est de faire comme l’on dit le « buzz » alors cela peut mener à toutes les dérives y compris pour certaines institutions respectables.
    C’est à rapprocher de l’épidemie de Creutzfeld Jacob dans les années 90: l’histoire se répète mais elle le peut tant l’homme a la mémoire courte.
    Continuez à vous insurger car le Français est une belle langue qu’il faut défendre sans relache.
    Confraternellement
    Dr Guérinier

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